Timbuktu

par Philippe  -  17 Juin 2014, 08:49

Drame, d'Abderrahmane Sissoko, avec Ibrahim Ahmed, Toulou Kiki, Abel Jofri, Fatoumata Diawara, Hichem Yacoubi, Ketthy Noël, Mehdi AJ Mohamed, Leyla Walet Mohamed, production : les films du warsa, Dune vision, Armada films, Arte France cinéma, Orange studio, Sylvie Pialat, Actes films, Rémi Bural, 2014.

Abderrahmane Sissoko est un cinéaste et producteur malien. Il profite de sa notoriété pour aider le cinéaste tchadien Mahmet Salet Haroun et l'association " Des cinémas pour l'Afrique" dont l'objectif est de sauver les salles de cinéma sur le continent. Il est l'un des cinéastes d'Afrique noire avec Ousmane Sembene, Idrissa Ouédraogo, Souleymane Cissé, Djibril Diop Mambaty a avoir obtenu une reconnaissance internationale. Il a étudié le cinéma de 1983 à 1989 au VGIK (Institut fédéral du cinéma russe). Il obtient le prix UCR au Festival de Cannes et le prix du meilleur court métrage au Festival du film africain de Milan en 1993 pour "Octobre". Il recevra le prix du long métrage en 1999 à ce même festival pour "La vie sur terre".

Le thème principal de l'œuvre d'Abderrahmane Sissoko est l'exil et le déplacement. Il peint l'Afrique avec des touches autobiographiques. Dans son dernier film "Bamako" (2006) il examine dans un procès fictif les accusations de la Banque mondiale dans une cour à Bamako au milieu de la vie et des tracas des habitants qui y résident. Dans le film "Timbuktu" le réalisateur raconte l'occupation de Tombouctou par les djihadistes en 2012 avant que les troupes françaises de l'opération Serval interviennent pour les déloger. Durant cette occupation les djihadistes vont commettre des exactions dont la lapidation d'un jeune couple le 27 juillet 2012 devant 200 personnes effarées dans le village d'Aguelhok au nord du Mali.

Le chef djihadiste est chargé de faire appliquer les diktats les plus surréalistes du juge du tribunal Islamique. Ce dernier interdit aux gens de chanter, de jouer de la musique, de danser et de jouer au football. Tombouctou qui était la "perle du désert " devient de plus en plus une ville fantôme ou les femmes sont de plus en plus voilées (scène ou les djihadistes imposent à une femme de vendre des poissons avec des gants et l'amènent en prison après qu'elle ait refusé) et les hommes de plus en plus soumis. Ceux qui refusent subissent des brimades comme la flagellation, l'emprisonnement ou l'amputation d'une main ou d'un pied. Seul un imam modéré tente sans grand succès de freiner la folie des occupants (scène ou l'imam demande au chef djihadiste de respecter la prière).

Dans le désert un couple de Touaregs Kidane et sa femme vivent avec leurs deux jeunes enfants en élevant quelques vaches. Les djihadistes investissent leur campement et volent leurs maigres biens. Ils finissent par se rendre compte qu'ils ont conçu leurs enfants sans être mariés. Le couple sera traduit devant le tribunal islamique et condamné après un procès expéditif à être lapidé. Pour montrer la cruauté et l'absurdité de la sentence et de son exécution le réalisateur respecte scrupuleusement le déroulement de l'événement. Le couple est amené au centre du village ou deux trous ont été creusés. Les bourreaux mettent l'homme et la femme dans les trous et les recouvrent de terre jusqu'à la taille. Ils jettent des pierres sur le couple jusqu'à ce qu'ils décèdent et laissent derrière eux deux orphelins. Cette exécution ignoble scandalise la presse internationale francophone et anglophone et incite Abderrahmane Sissoko à réaliser ce film. Ce film aurait mérité de figurer au palmarès du dernier Festival de Cannes mais il a tout de même obtenu le prix du Jury œcuménique et le prix François Chalais.

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