Ernest Pignon Ernest
Exposition du 25 juin 2016 au 8 janvier 2017 au Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain (MAMAC) de Nice, place Yves Klein, 06000 Nice, ouvert de 10h à 18h sauf le lundi (et le 25 décembre et le 1er janvier), tél. : 04.97.13.42.23, entrée : 10 €.
La rétrospective d'Ernest Pignon Ernest au MAMAC de Nice a été conçue par l'artiste. Elle fait suite à l'exposition de 1995 qui présentait les interventions de l'artiste dans les rues de Naples. Le MAMAC revient sur le parcours atypique de l'un des pionniers de l'art urbain en France. Le processus créatif d'Ernest Pignon Ernest obeit à une règle immuable. Il commence par sélectionner un lieu ou il veut travailler. Après un important travail de documentation il saisit tout ce qui se voit (espace, lumière, couleurs) et tout ce qui ne se voit pas (histoires, souvenirs, symboles). Il introduit dans ce lieu un élément de fiction (le plus souvent un corps à l'échelle 1) pour susciter sous diverses formes (métamorphoser, perturber, révéler, exacerber) la mémoire des habitants de ce lieu.
L'artiste utilise la sérigraphie. Il s'agit d'un procédé d'impression proche de la technique du pochoir qui consiste à positionner un film bloquant les rayons ultra violets sur un écran de tissu préalablement enduit d'une émulsion photo sensible laissant traverser l'encre aux endroits indiqués. Ernest Pignon Ernest intervient généralement de nuit, armé d'un rouleau de dessins, d'un pot de colle, d'une brosse et d'un pinceau. L'image est collée sur un mur puis livrée aux caprices du temps jusqu'à disparaître. Après sa disparition il ne reste que les croquis, les esquisses préparatoires, les dessins matrices des sérigraphies et les photographies prises in situ.
L'exposition offre sur quatre salles un aperçu des engagements politiques d'Ernest Pignon Ernest. Soucieux des questions de son temps il aborde tout d'abord le problème de l'immigration. En 1974 il se mobilise contre la politique raciste de l'apartheid et figure parmi les fondateurs du collectif "Artistes contre l'apartheid". Il colle sur un mur de la place Masséna de Nice une image représentant une famille noire derrière des barbelés pour révéler le vrai visage du régime sud africain de l'époque alors que la ville organise son jumelage avec la ville du Cap. Ernest Pignon Ernest ira en Afrique du sud en 2001 pour un projet sur le multiculturalisme. Sur place il constate les dégâts liés au SIDA et il décide d'utiliser la célèbre photo de Sam Nzima qui montre le cadavre d'Hector Pieterson le premier écolier tué à Soweto (1976). Ernest Pignon Ernest colle cette photo avec l'aide des habitants sur les murs des villes touchées par l'épidémie afin d'éveiller les consciences. Ernest Pignon Ernest s'engage également aux côtés des immigrés et des prisonniers dont il dénonce les conditions de vie inhumaines.
Ernest Pignon Ernest s'intéresse également aux villes qu'ils s'agisse de Naples mais également de Paris et de Lyon. A Naples il met en évidence le lien qui existe entre les différentes mythologies (grecque, romaine et chrétienne) qui expliquent les origines de ces villes et que l'on peut trouver dans les différents parcours qui jallonnent ces villes. Il crée entre 1988 et 1995 un parcours qui relie les différentes étapes de la vie aux mythes fondateurs et aux coutumes en s'inspirant de la peinture du Caravage. Ernest Pignon Ernest s'interroge également sur la modernité des villes. Il utilise les cabines téléphoniques ou il montre des humains isolés, seuls et égarés dans ces blocs vitrés voués à la communication.
L'exposition offre enfin une galerie de poètes (Maïakovski, Rimbaud, Pasolini, Neruda, Artaud, Desnos, Nerval, Darwich). Ernest Pignon Ernest considère qu'il doit plus aux poètes qu'aux peintres. Pour lui les poètes sont des mythes laïcs ou des icônes païennes. Leur portrait témoigne combien ils ont incarnés les aspirations, les drames et les tensions qu'ils ont traversé et combien ils portent en eux les stigmates de leur époque. Ernest Pignon Ernest réserve une part importante de son travail "à ceux de la poésie vécue" selon l'expression du poéte André Velter. C'est à dire ceux qui ont voulu coûte que coûte habiter poétiquement le monde. Ces poétes captent les signes, portent les paroles, les rêves et les utopies.
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